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crédit image Chris Hoareau |
Florence COLLIN |
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pour écrire à l'auteur |
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Le Vieux |
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Agrégé à son fauteuil, il remâche des jours chagrins qui s’éternisent. Ses songes en miettes s’égarent dans le crépuscule, et ses lèvres, toutes en chuchotis de souvenirs, lui content une vie qui se troue d’oublis. Sa vie ou celle d’un autre, il ne sait plus… Parfois, des lueurs de ravissement s’égouttent de ses cils, des frissons légers tremblotent à la surface d’une ombre frisée de rides, des mélancolies capricieuses diluent son cœur. Il vacille alors en vagues de soupirs, naufragé de tendresses démodées qui affleurent encore. À moins qu’elles ne sombrent elles aussi, il ne sait plus… Parfois il reçoit une visite. Mais elle repart toujours, muette de dépit. Un jour, elle l’emmènera loin du fauteuil. Pour un voyage sans bagage, sans itinéraire, sans destination. Et le fauteuil embrassera d’autres murmures. Ou d’autres silences, qu’importe…
Clair-obscur
Dans la sourde clarté de l’atelier, s’étire une éternité incertaine. Séraphine suspend son geste devant sa toile en enfantement, un sourire indécis s’attarde sur son visage. Puis d’une main légère, elle efface la brume qui trouble l’esquisse. Délivrées, les formes prennent vie, respirent, s’émancipent, lui échappent déjà vers des territoires qu’elle sait peuplés d’espérances vaines. On frappe à la porte. C’est l’heure des médicaments. Dans le regard bleu glacier passe une ombre, le crépuscule absorbe l’atelier. Le pinceau s’évade, s’abîme dans la toile.
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